« Our issues are not technology issues; our issues are human issues » – UBA Trends Day 2022

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« Nous avons pris conscience de l’ampleur du pouvoir que peut avoir la communication » et « nous nous engageons à faire en sorte que la société ressente des effets positifs et que nous n’utilisions notre communication que dans un but d’impact positif ».

C’est par ces mots intenses et lourds de sens que Mira De Maeyer (UBA Belgium) a introduit la UBA Trends Day de cette année.

Même dans le secteur de la communication, les pensées vont à nos voisins européens en Ukraine. Il y sera fait référence plus d’une fois au cours de cette journée. Les présentations ont eu lieu en direct de Bruxelles et étaient retransmises en livestream à domicile, et modérées par Ianka Fleerackers et Peter Hinssen.

« We are becoming the 1980s cyborgs »

La crise sanitaire nous a permis d’apprécier la simplicité des temps qui ont précédé le covid-19. Certain·es rêvent peut-être d’y revenir mais, même en fin de crise, la réalité s’impose à nous : il n’y a pas de retour possible en février 2020, explique Crystal Washington (Technology Strategist et Futurist). Toutefois, nous nous trouvons face à une opportunité de repenser notre environnement de travail. Le changement était déjà en marche. Il a simplement été accéléré par la force des choses, mais l’avènement du digital a déjà changé notre manière d’appréhender nos expériences. Les confinements successifs nous ont également laissé le temps de réfléchir à nos priorités : dépenser notre argent de manière consciente, soutenir des marques dont les valeurs sont alignées avec les nôtres, valoriser le bien-être au travail avant le salaire.

« All you have to do is accept the challenge. You are the game master » – Crystal Washington

Dans ce contexte, différentes tendances se détachent dans le monde de l’entreprise. On remarque d’abord que la technologie, tout en nous rendant plus efficaces et en nous permettant de travailler depuis chez soi, rend les connections sociales plus difficiles. Ainsi, dans beaucoup de domaines, l’argent gagné par la diminution de la taille des bureaux a été investi dans des activités de teambuilding. Le travail solitaire en distanciel a aussi rendu l’apport de chacun·e plus facile à quantifier – et en supprimant la fonction des middle managers qui pouvaient s’attribuer le travail de leurs équipes sans fournir d’apport personnel, il a été possible de valoriser d’autres fonctions. Enfin, la transition digitale s’est poursuivie par l’utilisation de logiciels d’automatisation, de chatbots… La montée en popularité des IA et des mondes virtuels sont autant d’opportunités pour les professionnel·les du marketing. Selon Crystal Washington, pour prévoir ce que nous réserve l’avenir, il faudra les consommateurs et les personnes qui sont en contact direct avec les problèmes contemporains : « We need to observe those easter eggs to create our ideal workplace, and this is how we can begin to actively shape what’s coming and shift trends coming our direction. »

La publicité n’est plus appelée publicité

Dans un contexte d’évolution permanente des technologies, il est difficile pour les entreprises de savoir où donner de la tête et à quelle avancée donner le plus d’importance. Selon Benedict Evans (Independent Analyst), le Web3 et le Métavers promettent une révolution des relations sociales, mais d’autres innovations ont fait des promesses similaires sans pour autant devenir universelles (les casques VR par exemple). Cette rapide transition technologique est en marche depuis plus de 50 ans, et les prochains grands succès sont difficilement prévisibles. On peut toutefois observer les tendances auprès des annonceurs, la plus significative d’entre elles étant le déclin des annonces publicitaires. Ce dernier peut cependant s’expliquer par la création de nouvelles stratégies marketing, qui relèvent de la publicité bien qu’elles n’en portent pas le nom, et auxquelles une partie croissante des budgets est allouée : l’argent qui était avant destiné à des annonces est maintenant investi dans le développement de son site internet ou dans la mise en avant de publications sur Instagram. Les budgets changent et s’adaptent au monde qui les entoure, et la publicité est maintenant un élément parmi tant d’autres dans un système plus vaste.

« Consumers don’t live in silos. Only brands do »

À l’heure où « purpose » est le maître-mot, il faut oser le changement. Et si les consommateurs changent, il vous revient d’en faire autant en tant que marque. Pour Vicki Loomes (TrendWatching), le message est clair et nous ne pouvons plus l’ignorer. « Ce que nous constatons, c’est une évolution très intéressante vers le ‘purpose’ », dit-elle. Le monde peut changer à bien des égards (technologiquement, politiquement, économiquement, etc.), mais « malgré ce changement, nous restons les mêmes personnes avec les mêmes besoins humains ». Et c’est là que réside l’essentiel. « Les innovations sont autant de nouvelles façons d’exprimer nos besoins humains fondamentaux. » Pensez à TikTok, qui représente une nouvelle forme d’expression personnelle, ou à Uber, qui modifie les attentes en matière de déplacement. « Ces technologies créent un effet boule de neige dans les attentes, qui se propagent à toutes sortes de secteurs. » Chaque marque avec laquelle les consommateurs entrent en contact est soumise à ces nouvelles attentes. « Consumer don’t live in silos. Only brands do. »

« Trends are nothing unless you do something with them » – Vicki Loomes

Il faut donc agir. Par exemple, selon la technique « Beyond Words », une tendance que Vicki Loomes décrit comme une conséquence des possibilités numériques et de leur influence sur les jeunes générations : « TikTok et Snapchat sont incroyablement populaires : les jeunes sont très habiles pour communiquer avec une incroyable nuance ». Les emojis, loin d’être simplement plaisants à utiliser, contribuent à façonner ces nouvelles possibilités de communication. « Les jeunes générations parlent un nouveau langage numérique. Les marques doivent s’impliquer et apprendre à comprendre ces nouveaux langages. » Vicki Loomes soutient que les outils numériques (IA, RV, avatars, plateformes de jeux, etc.) doivent être utilisés dans les stratégies de communication. Cela vous aidera à établir un lien avec les consommateurs.

Données & éthique : « It needs to be MUM »

« Nous voulons qu’Internet reste accessible et abordable pour tous », déclare Matt Brittin (Google). « La publicité joue un rôle essentiel à cet égard », poursuit-il, car ce sont souvent les recettes publicitaires qui rendent les médias accessibles à un large public. La publicité a longtemps financé nos médias, et Google s’est appuyé sur cette tradition. La publicité peut être vue comme une forme de tir à l’arc : on ne peut viser avec ses flèches que si une cible peut être identifiée. Il s’agit d’une donnée déterminante et essentielle dans le ciblage contextuel, le ciblage par intérêt et le ciblage par audience.

Mais, et c’est là que réside le grand point d’interrogation, « la question qui se pose à propos d’Internet en 2022 est de savoir si un tel modèle publicitaire est suffisamment bon. » Car, explique Matt Brittin, « Internet connaît actuellement un changement fondamental, et les citoyens veulent plus de vie privée et plus de contrôle de leurs données en ligne. Il convient au moins de leur expliquer pour quelle raison vous collectez des données, mais aussi de le faire de manière transparente. » Il ajoute : « Vous devez expliquer clairement à vos utilisateurs en quoi la collection de leurs données est un avantage pour eux. » Quoi que vous fassiez, « it needs to be MUM: Meaningful, Understandable and Memorable. »

« L’IA permet de démocratiser des solutions »

Cela doit être dit : « AI is happening right now. » Neil Deshmukh (PlantumAI) ne tourne pas autour du pot en ce qui concerne l’IA : « Le développement actuel de l’IA n’est pas y-un problème. L’IA est utilisée tout autour de nous en ce moment, et de plus en plus chaque jour ». À ceux pour qui l’IA est encore un concept vague, Neil Deshmukh le rend plus facile à comprendre : « Vous pouvez considérer l’IA comme un analyseur de ‘patterns’ sophistiqué. Donnez-lui un ensemble d’informations et il cherchera des ‘patterns’ dans toutes ces données. » Ce fontionnement la rend largement applicable et accessible à tous·tes.

Imaginez, décrit Neil Deshmukh, que pour lire des scans médicaux, vous devez avoir des connaissances médicales spécialisées très spécifiques. Très peu de gens en sont capables. Mais « avec l’IA, cette ‘connaissance’ du domaine n’est plus nécessaire. Elle devient généralisable. » Une fois que l’IA est programmée pour scanner, elle peut alors interpréter parfaitement les scans. En d’autres termes, n’importe qui peut, grâce à l’IA, interpréter des scans. « L’IA permet de démocratiser des solutions », déclare Neil Deshmukh.

« Avec l’IA, cette ‘connaissance’ du domaine n’est plus nécessaire. Elle devient généralisable » – Neil Deshmukh

Neil Deshmukh joint également le geste à la parole : dans son Inde natale, une graine de changement a été plantée en lui lorsqu’il a appris que l’eau de sa communauté était empoisonnée. Le projet qui en a découlé s’est ensuite transformé en PlantumAI, une application qui utilise l’IA pour donner aux agriculteurs le pouvoir de contrôler si les pesticides utilisés sur leurs cultures contaminent l’eau. Nous tenons à préciser que Neil Deshmukh, passionné, talentueux et socialement engagé, est un jeune diplômé du MIT et n’a que 19 ans.

« What we really need is a mindset shift »

À l’heure où l’éco-anxiété, la peur du changement climatique, est de plus en plus présente – particulièrement au sein de la génération Z, dont un quart déclare ne pas vouloir ou hésiter à avoir des enfants – il est du devoir des entreprises et des marques de se positionner sur les questions sociales qui animent notre monde contemporain, et d’agir pour le mieux. Dans son livre « Net Positive », Paul Polman (ex-CEO d’Unilever), explique comment, pour lui les entreprises peuvent prospérer en donnant plus qu’elles ne prennent.

« The cost of not acting is actually becoming higher than the cost of acting » – Paul Polman

Une entreprise ne peut jouir de son succès dans une société qui faillit, et il n’est pas seulement du devoir des gouvernements de se prononcer sur des sujets telles que l’écologie, les droits des minorités raciales et sexuelles, la pauvreté, ou même la guerre. Les entreprises doivent être tenues pour responsables de leur empreinte écologique, du traitement de leurs utilisateur·rices et de leurs employé·es, des dérives qui ont lieu sur leurs plateforme (comme le contenu pornographique et les appels à la haine sur Facebook), et agir pour un avenir durable. Et ainsi, il exhorte : « Take responsibility of your total impact! Net positive companies participate in the total transformation of what society needs. »

Se contenter de faire des coupes budgétaires et de limiter temporairement la casse lors des crises n’est plus suffisant, il faut mettre en place des solutions qui fonctionnent sur le long terme, passer d’une politique de mitigation des risques à celle des opportunités. Il faut également prendre des actions rapides et collectives. La plupart des entreprises actuellement se donnent des objectifs de réduction de leur empreinte carbone, mais simplement réduire le négatif n’endiguera pas la crise climatique : « Just being sustainable doesn’t work anymore if the world has overshot the planetary boundaries. The only thing that works is to think regenerative, restorative, reparative. And that is what we call Net Positive: how can you profit from solving the world’s problems, not creating the world’s problems? […] Net positive companies, first and foremost, take responsibility of their total handprint in the world. » De nombreux pas peuvent être pris afin d’avoir un impact global positif (handprint, pas uniquement footprint) sur le long terme : engager des personnes compétentes pour relever les défis de demain, placer l’intérêt commun avant celui des actionnaires (et le bénéfice suivra), participer activement à la transformation de la société pour le bien.

« It really is a human issue, and it starts with ourselves » – Paul Polman

« What we really need is a mindset shift. Most companies are in the CSR mode, Corporate Social Responsibility, which really deals with being less bad – ‘Oh I’m going to reduce my carbon emission, I’m going to have a little, but less deforestation, I want to be sure that there are less plastics of my products getting into the ocean’ – but in a world that is overshooting its planetary boundaries already, less bad is simply not good enough. – ‘I used to murder 10 people. Now I’m only murdering 5 people. Am I a better murderer?’ YOU tell me…! »

The Never Normal

« J’aime la technologie, je crois en la technologie », a confié Peter Hinssen à l’auditoire lors de ses déclarations finales à l’issue de cette journée des tendances UBA. « Ce que nous avons vu aujourd’hui, c’est que les technologies ont fait un sacré parcours. Nous avons vu l’essor d’entreprises devenues plus fortes que jamais, nous avons vu les côtés plus sombres et certains des aspects négatifs de la technologie, et nous arrivons maintenant lentement dans un monde où elle est parfaitement normale. Mais imaginer que c’est la dernière étape serait très, très stupide. »

« Nous vivons dans un monde qui bouge plus vite que jamais et qui s’accélère constamment. » L’époque actuelle n’est ni une ancienne ni une nouvelle normalité, veut-il faire comprendre à travers son discours. « Je l’appelle le ‘Jamais Normal’, the Never Normal. C’est ce qui nous apparaît clairement après cette journée. »

Net Positive (Paul Polman)

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